Vous avez mené plusieurs combats pour l’émancipation de la femme dans les années soixante-dix. Qu’avez-vous obtenu ?
Nos actions, ont facilité la vie des femmes même si elles n’étaient pas toujours spectaculaires. Nous avons obtenu que les veuves-divorcées puissent recevoir la réversion de la retraite de leur mari décédé au prorata des années de mariage, la Caisse d’allocations familiales se chargeant du recouvrement des pensions impayées. Nous avons créé le statut d’assistante maternelle, le statut de femmes de commerçants, artisans ou professions libérales ouvrant des droits à leur rémunération et à leur retraite. Je me suis aussi occupée des conditions de détention des femmes obtenant la possibilité pour une mère incarcérée de garder son enfant auprès d’elle jusqu’à ses 18 mois.
Et puis j’ai mené deux grands débats : le premier portant sur la prorogation de la loi Veil de 1974, devenue définitive en 1979, le second sur le viol. En 1980 j’ai obtenu qu’il soit reconnu comme un crime, jusqu’alors ce n’était qu’un délit.
Vous dites qu’il reste encore beaucoup à faire…
L’inégalité salariale entre hommes et femmes, à compétences égales, demeure. Pourtant rien ne peut la justifier. Aucune femme ne dirige une société du CAC 40. Hier encore « le monde » relatait la bataille d’Isabelle Kocher la Directrice Générale de GDF Suez pour la succession de Gérard Mestrallet à la présidence de l’entreprise. Dans un autre domaine, je soutiens actuellement deux femmes battues, une femme harcelée par un chef de rayon dans son hypermarché. Dire que l’égalité des hommes et des femmes est entendue, ce n’est pas vrai.
Comment réagissez-vous au mouvement Metoo ?
Il est important que les femmes prennent la parole et puissent évoquer les violences sexuelles subies. Ce que je regrette ce sont les dérapages. Je me considère comme une féministe non violente. C’est aux femmes et aux hommes, ensemble, de mettre fin à ces comportements violents et anormaux. Ces problèmes lourds, importants, requièrent de l’écoute, une intervention et une condamnation de la justice. A l’heure actuel seul 10% des femmes portent plainte et la justice n’a pas les moyens d’agir rapidement.
Vous avez fait vos premiers pas en politique au Conseil municipal de Neuilly sur Seine, aux côtés d’Achille Peretti, en 1971 qu’y avez-vous appris ?
Je faisais partie d’un club politique, de centre droit, appelé « Démocratie et Progrès », créé par Joseph Fontanet et Jacques Duhamel. Achille Peretti était élu systématiquement à la Mairie de Neuilly, pour moi la difficulté a consisté à figurer sur sa liste. Lors du second mandat, adjointe au commerce j’ai assisté à la création du carreau de Neuilly. Le débat portait sur la distribution des espaces, la taille des terrasses, le passage des poussettes. C’était intéressant au niveau humain même si je dois reconnaître que je n’ai jamais été passionnée par les mandats locaux.
Vous décrivez un monde politique très dur, cruel et à la fois on vous sent véritablement engagée.
En politique, il n’y a pas de vrais amis, ni de générosité. Giscard ne va pas voir Poniatowski, malade, alors qu’il lui doit en partie sa victoire. Il faut avoir le cuir épais pour faire de la politique et en même temps, c’est passionnant. On a le sentiment de poser des jalons pour améliorer la vie sociale.
Quel message adressez-vous aux femmes qui n’osent pas?
En 1981 j’ai créé l’association « Dialogue » pour aider les femmes à faire entendre leur voix, à entrer en politique et à se former pour réussir. Pendant 5 ans nous avons appris aux conseillères municipales, élues de villes moyennes, à prendre la parole en public. Je les incitais ensuite à se présenter à la Mairie et au conseil régional. Parmi celles que j’ai formées on peut citer Jacqueline Gouriout, actuelle ministre de Macron chargée du dossier Corse. Mon conseil demeure le même : ne pas avoir peur, oser, la prise de parole en public constitue un véritable moyen d’influence.